"A-t-il aussi vu Maboroshi cette nuit-là?" L'ombre de la mort et l'étincelle de vie, en une perpétuelle agitation derrière la façade du quotidien?» Ce sont les mots qu'a mis le jeune réalisateur Hirokazu Kore-Eda comme sous-titre à son premier film Maboroshi no hikari - La lumière de l'illusion. Son poème est d'une singulière beauté, d'une étonnante simplicité. Il ne nécessite ni une intrigue alambiquée, pas plus que de longs dialogues. Sa force repose sur le langage des images, comme s'il voulait nous rappeler que les mots ne sont que de la buée sur le miroir de la vie. Yumiko a perdu sa grand-mère à l'âge de douze ans. Elle est toujours poursuivie par le regret de n'avoir pu la retenir alors qu'elle s'en allait. A vingt-cinq ans, elle se marie avec Ikuo, qui entra dans sa vie comme une réincarnation de la grand-mère. Pourtant, Yumiko ne cesse d'être hantée par le souvenir du jour de la mort de la vieille dame. La vie s'écoule paisiblement avec leur premier fils, Yuichi, jusqu'au jour où Ikuo se suicide en se jetant sous un train, ne laissant que la clé de son vélo comme explication. Encore une fois, Yumiko venait de perdre un être aimé.
Cinq ans plus tard, elle se remarie avec Tamio, un jeune veuf qui habite le petit village d'Oku-Noto, au bord de la mer. Sa dernière femme lui a laissé une petite fille de huit ans, Tomoko. La douleur semble avoir abandonné une Yumiko apaisée, et les jours s'écoulent tranquillement. Mais six mois plus tard, retournant dans sa ville natale pour le mariage de son frère, Yumiko est de nouveau hantée par le souvenir d'Ikuo. A la fin, elle se tient seule, au bord de la falaise, fixant l'océan. Tamio la retrouve et s'approche. Fondant en larmes, pour la première fois, elle se confie à son mari: «Je ne comprends toujours pas pourquoi Ikuo s'est tué.» Et Tamio répond: «Mon père qui était pêcheur disait toujours: nous sommes attirés par l'océan. Et personne n'est à l'abri de la fascination de cette lumière que l'on appelle Maboroshi.»